Ce qui se passe maintenant dépend de tout ce qui s’est passé depuis l’éternité. Ce qui se passe maintenant influence tout ce qui se passera dans le futur. Le visage de l’univers maintenant inclut tout le passé, inclut tout le futur.
Ce qui se passe ici dépend de tout ce qui se passe ailleurs. Tout ce qui se passe en un point de l’univers dépend de tout le reste de l’univers.
Un jour, un maître et son disciple suivent un enterrement. Le disciple demande au maître, pointant du doigt le cercueil : « Est-ce vivant ou est-ce mort ? » « Je ne peux pas dire » répond le maître. « Comment ça, vous ne pouvez pas dire ? Est-ce vivant ou est-ce mort ? » « On ne peut pas dire. »
A chaque moment, l’univers prend un nouveau visage. Si nous pensons « c’est vivant », c’est alors seulement vivant et notre pensée reste étroite.
La vie inclut les naissances et les morts incessantes. Le vivant est peuplé de toutes les morts qui nous ont précédés ; la vie ne finit pas quand nous mourrons. Cela signifie que nous mourrons et que nous ne mourrons pas. La vie de Bouddha est éternelle. Elle apparaît sans cesse sous une nouvelle forme, mais c’est toujours la même vie.
Chacun de nous apparaît à un moment dans l’univers, apparaît en un lieu de l’univers et, un peu plus tard, disparaît. Nous parlons alors de « moi », de « ma » vie. Ainsi, quand nous parlons de notre vie, nous ne parlons que de notre vie individuelle et nous oublions la totalité de la vie, la totalité des existences qui peuplent notre vie, qui donnent vie à notre vie.
En réalité, moi et ma vie ne sont pas distincts de la vie de l’univers, de la vie de la totalité. Aussi bien les morts que ceux qui ne sont pas encore nés, aussi bien ceux qui sont près de nous que ceux qui sont loin de nous, tout cela, c’est notre vie. Notre vie est illimitée, sans limite.
Notre pratique, la pratique du zen, de la Voie du Bouddha, c’est d’accéder à cela, de reconnaître notre petit « moi » et, en même temps, de voir qu’il n’est autre que l’univers dans sa totalité, qu’il n’est pas séparé de toutes les existences.
Ainsi, l’éveil est illimité ; notre vraie nature est illimitée. Notre vie est illimitée, sans début ni fin. Elle inclut le « moi », les représentations du « moi », elle inclut toutes les formes illimitées, mais elle ne s’arrête à aucune d’entre elles.
Telle est la pratique de l’esprit éveillé : tout accepter, ne rien garder, ne rien rejeter, se donner de tout cœur à cette vie illimitée.
Kusen (enseignement oral) de Taiun JP Faure – juin 2014